21 Février 2016

WebRTC: Quel avenir !

Les dirigeants de Cisco, Lifesize, Polycom et Vidyo ont tous participé à un événement exceptionnel : une table ronde sur l'avenir du WebRTC organisée par Wainhouse Research. La discussion a été animée et il y avait de considérable désaccord entre eux, comme vous pouvez l'imaginer.

D'abord le contexte. WebRTC signifie " Web Real-Time Communications " et est un framework open source ( définition API ) en cours d'élaboration par le W3C pour permettre aux applications de type "navigateur web" de partage des fichiers voix, vidéo et données sans plug-ins. L'implémentation actuelle est toujours en cours, et a été adoptée dans les navigateurs : Chrome, Opera et Firefox. Par contre IE de Microsoft et Safari d'Apple sont construites sur un code différent et, par conséquent, ne sont pas encore interopérables et n'adoptent donc pas encore la norme.

On peux penser que dans la mesure ou les trois premiers comptent pour plus de la moitié de tous les navigations sur le Web aujourd'hui, l'adoption est inévitable. 

Mais c'est sans compter sur la puissance de Microsoft qui a présenté sa vision de ce mode de communication avec son protocole CU-RTC-Web, qui dispose d’un avantage de poids. Microsoft souligne en effet que WebRTC, actuellement en brouillon au W3C, comporte un défaut dans la cuirasse : il n’est pas possible de mettre en relation et de manière directe deux navigateurs entre eux. Ainsi, les communications VoIP doivent passer par un serveur centralisé.

La solution de Microsoft, en plus de permettre cette communication gérée par un serveur, permet également d’établir un lien entre deux navigateurs. La démonstration de la forme s’appuie d’ailleurs sur un Internet Explorer 10 sous Windows 8 et un Chrome sous OS X. Microsoft précise toutefois que WebRTC et CU-RTC-Web ne sont pas nécessairement ennemis. Ainsi, WebRTC pourrait très bien prendre place au-dessus du second pour bénéficier de fondations plus « propres ». 

Cependant, la principale différence entre les deux protocoles vient de subir un coup de gomme vengeur. Google (Google Chrome) et Mozilla (Firefox) se sont associés pour enrichir le protocole WebRTC d’une communication directe entre les navigateurs. 

La démonstration a été réalisée par Todd Simpson, responsable de l’innovation chez Mozilla, et Hugh Finnan, responsable gestion des produits chez Google. Elle était basée sur deux versions des navigateurs qui peuvent en fait être récupérées : Chrome 25 bêta et la dernière Nightly pour Firefox. Dans cette dernière, l’utilisateur devra cependant activer la ligne « media.peerconnection.enabled » avec la valeur « true » dans le « about:config ».

La présentation faite par Mozilla et Chrome est évidemment un pas important pour la technologie WebRTC. Puisqu’il s’agit d’un standard en formation, la capacité est inhérente au navigateur. De fait, l’utilisateur peut se servir sous Firefox d’un service proposant de la VoIP et appeler un collègue se servant de Chrome, le tout sans passer par un plug-in évidemment. Il est intéressant de remarquer que ni Google, ni Mozilla n’abordent la technologie proposée par Microsoft dans leurs billets respectifs.

Sinon, ou en sommes nous ?

Il ya beaucoup de battage autour de ce que les entreprises peuvent attendre de l'apport de WebRTC, et aussi beaucoup de fausses idées. Bien que le protocole ne remplacera pas l'héritage des systèmes d'infrastructure de conférence vidéo sur IP, les premières applications WebRTC et leurs capacités d'intégrations commencent à avoir un impact dans l'environnement industriel, offrant des options de communication plus simples et moins coûteux en temps réel. Si les navigateurs web sont devenus omniprésentes et interopérables, ils permettront, dans un délai proche, aux développeurs web d'ajouter facilement des fonctionnalités de voix / vidéo dans leurs applications, ou de créer de nouvelles applications qui fournissent des services vocaux et appels vidéo sans la nécessité d'une vaste infrastructure d'applications dédiées en back-end. Semblable à d'autres applications de peer-to-peer (ex: skype, ...), Il suffit de trouver l'autre personne et d'initier une conversation.

Les applications tournées vers le client sont celles qui reçoivent le plus d'attention en ce moment, car elles peuvent tirer parti de WebRTC pour offrir la voix ou la vidéo afin de discuter directement entre clients par le biais de navigateur Web, il n'y a qu'a voir les evolutions récentes du client Skype qui après avoir inclus le suuport de la vidéo point à point et en groupe apporte maintenant le partage de document. 

Pensez aux possibilités offertes à partir d'un navigateur Web standard :

  • Etre très utile pour l'utilisateur final. Les sites grand public sont sans le savoir, tous porteurs de l'ADN pour WebRTC. Le protocole permettra aux entreprises d'améliorer leurs sites avec des capacités de click-to-call pour leurs clients, sans pour autant investir massivement sur un tronc commun d'applications et services. Les utilisateurs pourront cliquer sur un lien sans avoir à télécharger les plug-ins ou même coupler un terminal téléphonique, ils pourront immédiatement parler à une personne, un peu comme ce que nous faisons déjà avec la fonctionnalité de "chat" sur leurs client web (Skype pour le grand public) ou Lync (pour le professionnel).
  • Avec WebRTC, les entreprises seront en mesure d'accueillir les réunions internes et externes à l'aide d'un navigateur Web au lieu d'un client installé. Comme WebRTC devient plus omniprésente, les développeurs se familiarisant avec la norme, les entreprises vont commencer à écrire leurs propres applications WebRTC afin de profiter de la fonctionnalité et des économies de coûts.

Et la sécurité

Il y a des notions de cryptage lors du démarrage d'un appel audio/video, et les navigateurs web supportant WebRTC devront négocier s'ils soutiennent tous deux le même chiffrement. L'installation de contrôleur de session (SBC ou Session Border Controler) sera un bon moyen pour aider le travail de communication peer-to -peer avec un pare-feu d'entreprise en place, et les constructeurs de système de visioconférence l'ont bien compris.

AnyMeeting, un fournisseur de services de conférence Web qui utilise le navigateur pour ses services de communication en temps réel est d'avis que le protocole WebRTC permettra d'assurer des communications basées sur le Web plus sûr pour les entreprises. « Les voies de communication sont cryptées, donc WebRTC est probablement plus sûr qu'un téléphone fixe », a déclaré Costin Tuculescu , fondateur et PDG de AnyMeeting. AnyMeeting utilisait précédemment la technologie Flash pour ses réunions audio et vidéo, mais maintenant qu'il a mise en œuvre le protocole WebRTC. « Nous avons vu WebRTC comme un excellent moyen de tenir notre promesse : "utiliser facilement la communication basée sur le navigateur ", a déclaré Tuculescu.

Qu'est-ce que WebRTC faire pour l'industrie de la visioconférence ?

Tout d'abord, il va changer la nature des terminaux de visioconférence. Chaque ordinateur de bureau, téléphone et tablette sera essentiellement un périphérique d'extrémité. Cela effraie certains fournisseurs, du moins ceux qui sont encore fortement axés sur les systèmes à base de salle de conférence dédiée. L'avenir, toutefois, ne réside pas dans les systèmes traditionnels, du moins de l'avis de certains de ces constructeurs.

Le premier besoin d'une infrastructure de visioconférence est de soutenir la conférence multi-points. Mais croire que les utilisateurs finaux aiment à se réunir dans leurs chambres d'hôtel ou dans le salon à la maison, est une culture faiblement partagée encore à ce jour. Rien n'est une panacée et il ne faut pas simplifier à l'excès l'industrie en disant tout finira sur un périphérique mobile ou de bureau.

WebRTC n'est donc pas une panacée. Il s'agit d'une norme en évolution qui est loin d'être pleinement adopté. Il faudra probablement un an ou plus avant qu'elle ne s'installe vraiment dans les moeurs. Personne ne connaît la date d'adoption pour les navigateurs "IE" ou "Safari". Il y a aussi des problèmes connus avec une qualité audio et la gestion de la bande passante. Ces questions sont essentielles pour les entreprises clientes qui comptent sur des communications de qualité et ne peuvent pas se permettre un grand déploiement qui affecterait gravement leur image et la qualité de leurs services.

Remplacer une infrastructure de conférence VoiP/ Vidéo dans l'entreprise : Le développement de logiciels autour des applications WebRTC est en augmentation, mais pour les entreprises, faire le saut et remplacer leurs systèmes existants - y compris Microsoft Lync et Cisco Jabber - avec WebRTC et s'appuyer dessus pour des réunions audio et vidéo n'est pas encore totalement acceptés, la technologie existe, mais il y a beaucoup d'inertie à surmonter pour réussir à ce que WebRTC fasse sa place. Si le protocole répond aux avantages d'une faible maintenance et d'un service acceptable au vue des systèmes actuels, nous pourrions commencer à voir massivement une adoption de la part des entreprises et clients finaux.

Donc, si les applications WebRTC ne remplacent pas les technologies existantes, du-moins dans un premier temps, elles peuvent aider à combler les lacunes, en particulier celles des centres d'appels qui sont très intéressés par la simplification du client de navigation avec WebRTC. En raison des capacités de cryptage associées au protocole, même les organismes financiers et de la santé manifestent un intérêt dans l'utilisation de WebRTC pour les réunions de la clientèle et la télémédecine.

Quelle est la prise en charge de l'industrie ?

Les technologues peuvent, mais le client n'a pas pour autant. C'est un peu l'inverse du slogan de Sony : "Vous l'avez rêvé, Sony l'a fait".

Si les industriels ou technologues sont en accord sur un point, c'est qu'ils souhaitent une discussion sur les différentes normes et protocoles. Ils doivent se concentrer sur l'implémentation et l'application qui prendront en charge les besoins d'une entreprise ou société et celà au travers d'une interface universelle. A bien des égards le développement de WebRTC ressemble à celui de SIP. Comme SIP, WebRTC fournit un cadre pour la communication, mais il laisse de nombreux détails en suspend. Tant que les différents fournisseurs et/ou constructeurs mettront en œuvre la sécurité, la gestion, l'encapsulation, et ainsi de suite, de différentes manières, une véritable interopérabilité restera problématique.

Il ne fait aucun doute que WebRTC commence à attirer sérieusement l'attention. Il a eu quelques succès récents, avec l'annonce que Google et Vidyo avaient signé un accord visant à tirer parti de la gestion de la bande passante de Vidyo sur la plateforme de Google. "Nous allons maintenant combiner la puissance de WebRTC avec les avantages de la technologie Vidyo et offrir la meilleure expérience possible à nos utilisateurs » a déclaré dans un communiqué, Chee Chew, vice-président de l'ingénierie chez Google.

Un champion de la taille de Google aura certainement un impact sur l'acceptation de la RTC et démontre que Vidyo n'a pas peur de l'impact que cela aura sur leur marché. Lifesize commence des tests et sollicite ces distributeurs pour connaitre leur recentie et l'approche qu'ils souhaiteraient, afin de pousser l'utilisation de WebRTC par l'ensemble des clients dans un délai rapide. On vois donc que les choses sont pris à bras le corps pour mettre en oeuvre rapidement une première implémentation de ce nouveau moyen de communication.

Ceux qui sont intéressés par WebRTC pourront en tout cas utiliser les liens utiles suivants :

Source : Mozilla, Wainhouse Research, Microsoft, Google, Lifesize.